Do not follow this hidden link or you will be blocked from this website !
Initiatives écologiques

Encourager la vie: le jardin secret et partagé

25 avril 2025

Derrière ce nom oxymorique se cache une initiative féconde, parvenue à créer un lieu où éclosent la vie et les rencontres, à Bordeaux.

Le jardin secret : c’est comme cela que nous appelions, avec mon fils de 4 ans, cette parcelle de terre qui était cachée derrière une immense haie de lauriers à côté du presbytère. On y pénétrait par deux espèces de trouées, et quand on se retrouvait de l’autre côté, on était ailleurs : à la campagne en pleine ville, dans ce quartier «mixte» fait d’échoppes (petites maisons typiques à Bordeaux) et d’immeubles des années 1940 à 1970 formant la cité de la Benauge. Dans ce jardin, il y a un arbousier centenaire, un petit pêcher, un figuier stérile (étrange pour une Église), en automne des crocus, au printemps quelques jonquilles. Et les oiseaux qui chantent. Un jour, un ami m’a dit gaiement : « C’est le dernier endroit où l’on voit encore des insectes ! » Un petit paradis.

Pendant ce temps, l’Église, asphyxiée par des problèmes financiers, commençait à faire des calculs : un terrain comme cela, ça vaut des sous. Faudra- t-il le sacrifier ? Avec le conseil local, nous ne l’entendions pas ainsi. Alors nous avons sorti l’artillerie lourde :
« l’écodiaconie » – heureusement, c’était à la mode. Et de citer les grands théologiens tels que Albert Schweitzer et sa théologie fondée sur le respect de la vie, Théodore Monod, naturaliste, à la vie intérieure intense, des régionalistes protestants : D. de Rougemont, J-F. Oberlin, pionnier de l’écodiaconie, ou encore L. Ragaz, militant dans le christianisme social et éco-théologien, mais aussi J. Ellul, P. Tillich ou J. Moltmann, qui sont aussi connus pour leurs apports intellectuels dans ce domaine.

Nourrir et accueillir

Avons - nous eu gain de cause ? Oui. Enfin, presque ! Un legs inattendu est venu au secours de tous nos arguments. Mais le jardin était sauvé et il ne restait maintenant qu’à le partager. Comment ? D’abord nous avons rêvé : avec ce jardin, non seulement nous allions faire un potager, mais en plus nous allions nourrir des personnes sans ressources et même disposer au fond du temple des caisses de légumes dans lesquelles les paroissiens pourraient piocher le dimanche. Byzance ! Mais ce n’est pas tout : le jardin allait aussi devenir un lieu de rencontres extraordinaires entre les « bobos » des échoppes et les habitants de la cité. Et ce n’est pas tout ! On allait aussi pouvoir faire un partenariat avec les musulmans de la mosquée du quartier, etc.

Après les rêves, la réalité : aujourd’hui, une quinzaine de personnes font vivre ce jardin. Selon Hélène Poulon, qui nous enseigne l’art du jardinage depuis trois ans (grâce à des aides de l’État), dix personnes, c’est un bon groupe. Dans ce groupe, il y a des personnes engagées dans la paroisse et d’autres pas. Mais aucune personne de la cité. Nous devons faire le constat qu’il faudrait faire mieux pour créer la rencontre. Quant à la production, elle varie. Hélène nous dit que c’est normal, et nous faisons l ’expérience du temps à l’échelle de la nature, ce qui est très bénéfique pour nos âmes abîmées par les écrans et le scrolling (le déplacement frénétique des images sur un écran).

Finalement, le jardin secret et partagé est une expérience heureuse, une coulée verte qui s’écoule près du temple, où les oiseaux chantent et les insectes prolifèrent. Les blettes comme l ’amitié y poussent, les fraises aussi quand elles le veulent !

© Nina Liberman

 

Nina Liberman
Pasteure de Bordeaux Rive-Droite

Commentaires