Être signe du Dieu vivant - Relecture de Genèse 4
L’histoire d’Abel et Caïn rencontre une résonance toute particulière pour les détenus. Elle permet d’amorcer une réflexion sur le mal, mais surtout, sur les moyens de le dépasser et d’envisager leur vie après la prison.
Tout le livre de la Genèse nous parle d’une recherche en fraternité et il faudra attendre la fin du livre pour entendre une issue heureuse aux multiples conflits entre frères lorsque Joseph, par la force du pardon, est en mesure d’interrompre le maléfice de la répétition.
Le « frère » : voilà un mot qui revient à sept reprises dans le récit de Caïn et Abel où Dieu tourne son regard vers Abel afin que Caïn accepte enfin la présence de son frère et comprenne
qu’une vie dédiée uniquement à ellemême ne peut que se détruire.
Lorsqu’un aumônier de prison relit avec un détenu l’histoire de Caïn et Abel, la première chose qui lui importe de souligner c’est que Dieu n’interrompt à aucun moment le dialogue avec le meurtrier, avec celui qui a déclenché la spirale de la violence et qui craint désormais pour sa vie.
La seconde, c’est que Dieu protège Caïn par un signe qui empêche de le tuer. Thomas Römer dans son commentaire écrit : « Le texte ne précise pas la nature du signe, ce qui importe au narrateur, c’est insister sur le fait que la vie humaine, même celle d’un meurtrier, est sacrée. Aucun être humain n’a le droit de prendre la vie d’un autre. »
Maintenant ne nous y trompons pas : Dieu n’efface pas la faute de Caïn, cette faute si lourde à porter.
Caïn est bien condamné à entrer dans le pays de Nod, un pays d’errance où tout devient instable. Nous pourrions dire que la période carcérale correspond au pays de Nod.
À nous donc, en tant qu’aumônier de prison, d’être le signe de ce Dieu qui parle et désire entrer en relation avec nous, ce Dieu qui au-delà du mal commis maintient l’avenir ouvert. Lui qui peut faire surgir du neuf dans les impasses humaines, dans les situations verrouillées.
À nous donc de porter cette parole auprès des détenus que nous visitons : derrière le mur de ta cellule, de ton désespoir, de ta culpabilité, un nouveau départ est possible pour toi.