Les vacances sont-elles devenues sacrées ?

29 juin 2020

L’importance accordée aux vacances pose la question de leur sacralisation.

Les accords de Matignon, signés en 1936, instauraient l’obligation pour les employeurs d’accorder deux semaines de congés payés par an à tout salarié. La durée est passée à trois semaines en 1956, puis à quatre en 1969, et enfin à cinq en 1982. Aujourd’hui, la moyenne est de trente-trois jours, contre douze aux États-Unis, et 12,5 au Japon. Pour les Français, les vacances ont un contenu symbolique : la mer signifie le retour aux sources de la vie, la montagne permet de prendre de la hauteur, la campagne représente le jardin d’Éden loin des nocivités de la civilisation, l’île fait rêver du paradis… Les Parisiens fuyant Paris ou encore les mouvements de grève suspendus à l’approche des congés montrent un besoin de s’évader, à en croire l’auteur américain Ted Stanger dans Sacrées vacances !

Pourquoi ce besoin de s’évader ?

Je constate un certain mal-être au travail chez beaucoup de nos concitoyens. Désenchanté, le travail est devenu un poids au lieu d’une joie. Le travailleur n’arrive plus à trouver de sens subjectif au travail et se sent obligé de s’y soumettre comme à une contrainte extérieure que lui impose la loi du rendement et de la productivité maximale. Le quotidien devient asservissant, hostile et suscite des envies de sortir de chez soi, voire de soi. On s’accomplit par la consommation pour se sauver de l’idolâtrie du travail. Ce premier type de repos aliène.

Jean Calvin rappelle que l’humain ne peut pas se réaliser par lui-même ou par son travail. Dieu lui-même se repose dans la contemplation après six jours de labeur, pour dire que la vie ne se réduit pas au travail et que l’identité ultime de toute créature est un don de Dieu. Le travailleur recevant ce don vit avec reconnaissance la mission au service de la Création qui lui est confiée. Le travail devient une vocation, reçoit un sens et permet la joie dans le repos de la contemplation. Le repos n’est plus une fuite, sacralisée pour essayer de combler un vide d’identité, mais un cadeau béni. Ce second type de repos est un don de Dieu qui libère.

Mino Randriamanantena
pasteur à Toulouse

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