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Sur le terrain

L’action sociale basée sur l’écoute

01 décembre 2019

Le Centre d’action sociale protestant (Casp) vient en aide à des personnes en détresse dans toute l’Île-de-France. Mais son action répond à des problématiques en constante évolution ; ce qui nécessite de se réinventer. Pour cela, il s’agit d’être à l’écoute de tous les acteurs concernés et de savoir établir avec eux un dialogue.

Le Casp soutient des populations en situation de détresse et d’exclusion. Il dispose de 65 structures et services pour accueillir, orienter, héberger, loger et accompagner des personnes à la rue ou sans domicile, sans emploi, en rupture sociale (personnes en détention, sortant de prison ou sous-main de justice), en demande d’asile ou personnes migrantes… Le travail du Casp s’effectue avant tout à l’échelle individuelle. « Notre credo, c’est l’accompagnement de chaque personne en faisant en sorte qu’elle soit actrice de son insertion », indique Pierre Mirabaud, le second vice-président de l’association. « Nous fournissons un accueil inconditionnel. » Avec, en 2018, 534 salariés et 261 bénévoles, le Casp est en mesure de venir en aide à un public très hétérogène et d’agir à grande échelle. Mais les formes de pauvreté et le public concerné varient et le Casp doit en permanence développer son action pour s’adapter à ces changements. Ainsi que l’a dit son président, Antoine Durrleman, lors de la dernière assemblée générale « le contexte économique est meilleur, mais sans que cela entame le socle de la pauvreté ».

© Pixabay

Agir en réseaux

« Il faut constamment être à l’écoute de ce qu’il se passe », explique Pierre Mirabaud. Cette écoute ne concerne pas que les personnes aidées. Le Casp tente de travailler de concert avec d’autres associations dans le but de porter un message à une échelle plus large. Il est membre de diverses fédérations et collectifs d’associations, comme la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), la Fédération de l’entraide protestante (Fep) ou encore l’Unafo (Union professionnelle du logement accompagné). Il peut ainsi mettre en place une action en réseau et échanger avec d’autres acteurs, par exemple sur le revenu universel d’activités. Cette promesse de campagne d’Emmanuel Macron est le sujet d’une grande concertation lancée le 3 juin et à laquelle l’Unafo participe pour faire porter la voix des associations. Un moyen donc, pour le Casp, de faire remonter certaines interrogations et d’avoir un rôle à jouer à l’échelle nationale.

Le Casp entretient aussi un dialogue fréquent avec les pouvoirs publics. Par exemple, Alain Régnier, délégué interministériel en charge de l’intégration des réfugiés, était l’invité du Casp lors de son assemblée générale le 15 juin. Il a pu participer au débat organisé autour de la question de l’Aide aux réfugiés. Le Casp a en effet prévu d’ouvrir des hébergements pour 150 d’entre eux en région parisienne. Cette rencontre a donc permis un échange entre les pouvoirs publics et les acteurs concrets de l’Aide aux réfugiés. Si le Casp peut faire part de ses demandes et observations aux pouvoirs publics, ceux-ci peuvent aussi le contacter pour réaliser certaines actions qu’ils jugent prioritaires. Cela a été le cas en 2017 pour les mineurs vivant dans le quartier de la Goutte d’or dans le 18e arrondissement de Paris. Le Casp a été missionné par la Mairie de Paris pour accompagner ces mineurs en errance vers une prise en charge adaptée afin de les sortir de la grande précarité. C’est donc grâce à un travail en réseau fait d’échanges que l’association a pu faire face à ce nouvel enjeu et venir en aide à un nouveau profil d’individus. À la demande des pouvoirs publics, elle essaie également de développer le Un chez-soi d’abord, une conception de la lutte contre la pauvreté qui place le logement au cœur de son action. Toutefois, trouver des logements adéquats à Paris se révèle compliqué.

© Lucile

 

Croiser les regards

En 2015 et 2016, le Casp a entrepris de diversifier son activité en fusionnant avec deux autres associations, La Clairière (association d’entraide fondée par l’Oratoire du Louvre), puis l’Arapej (association réflexion action prison et justice). Avec La Clairière, il a pu développer une action de proximité en allant, par exemple, dans la rue établir directement un lien avec les personnes, ou en dispensant des cours de langue ou d’aide aux devoirs dans le quartier des Halles à Paris. L’Arapej, quant à elle, accompagne les personnes détenues, sous-main de justice et sortant de prison. Créée par des aumôniers de prison en 1976, une de ses créations est le Numéro vert Arapej, service unique en France d’informations juridiques et sociales pour les personnes en détention et leurs proches.

Mais le dialogue et l’écoute représentent également un enjeu interne à l’association. Faire échanger ses membres n’est pas une préoccupation anodine pour le bon déroulement des services proposés. Chaque année, l’association organise un séminaire de 24 heures entre les directeurs et les administrateurs de l’association afin d’échanger autour d’un thème et de faire émerger des solutions concrètes. L’année dernière, ce séminaire, sur le bénévolat, a débouché sur un projet de développement pour permettre à plus de bénévoles d’effectuer un travail complémentaire à celui des salariés. Ce moment d’échange, en plus de créer des liens entre les membres, est un temps fort pour l’évolution de l’association. Presque tous les ans, l’ensemble des salariés, des bénévoles et des administrateurs est convié à « la journée des équipes », occasion de mieux se connaître, de mieux comprendre les différentes missions du Casp et de développer la cohésion interne.

Se remettre en question

En interne, il s’agit pour les bénévoles et les salariés de l’association de savoir remarquer les évolutions dans les problèmes auxquels ils doivent faire face. Ils ont par exemple relevé le nombre croissant de familles monoparentales parmi les personnes qu’aide le Casp. Il a donc fallu revoir l’organisation du pôle logement et la façon dont les différents services sont proposés. Par l’intermédiaire de ses travailleurs sociaux dans les divers centres d’accueil, le Casp a également pu se rendre compte de la place majeure des problématiques psychologiques, voire psychiatriques, des personnes dans l’aide à l’insertion. En effet, l’association a réalisé que la durée croissante des situations de précarité pouvait accroître ce genre de troubles. Une réflexion est donc en cours en son sein pour développer l’aide psychologique dans ses différents services, que ce soient les établissements d’urgence ou les accompagnements et les aides sur le plus long terme.

Pierre Mirabaud pointe également l’importance d’être à l’écoute des salariés. Avec un tel nombre de salariés, leur bien-être est un enjeu social en lui-même et conditionne aussi le bon déroulement de l’action sociale du Casp. Le travail qu’effectuent les salariés auprès d’un public en détresse n’est pas toujours évident. Pour les travailleurs sociaux et les salariés sur le terrain par exemple, être constamment face à des personnes dans l’extrême pauvreté ou dans des situations sociales très difficiles peut se révéler lourd à porter psychologiquement. Il est donc très important d’établir une relation de confiance avec les salariés pour qu’ils puissent mener à bien leur mission au sein de l’association.

« L’attention qu’on porte aux salariés se répercute sur l’attention qu’ils portent aux personnes accompagnées », résume Pierre Mirabaud.

Gabrielle Grécourt
stagiaire au journal Paroles protestantes-Paris

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