Cinéma

The Lost King

12 avril 2023

Tournée dans le cadre magnifique de la vieille ville médiévale d’Édimbourg, cette comédie dramatique du grand réalisateur britannique Stephen Frears est servie avec talent par les deux co-scénaristes (Steve Coogan et Jeff Pope) et le compositeur (Alexandre Desplat) de son film Philomena (2013).

Elle retrace l’aventure incroyable mais vraie d’une femme ordinaire, Philippa Langley, qui, guidée par son intuition et malgré l’incompréhension de ses proches et la défiance du monde universitaire, n’a eu de cesse, malgré le syndrome de fatigue chronique dont elle était atteinte, de rétablir la vérité autour du roi Richard III. Interpelée par le regard de l’acteur lors d’une représentation de la pièce, elle se convainc de l’écart probable entre la réalité historique et la légende du monstre difforme et cruel injustement noirci par un Shakespeare au service des Tudor, les ennemis de Richard.

Dès lors, mue par une foi qui déplace les montagnes, elle se prend de passion pour ce roi, adhère à l’association créée par ses fans et va se lancer, nouveau Don Quichotte, dans un combat épique de près de dix ans pour retrouver ses restes sous un improbable parking de Leicester, lui donner une sépulture digne et le réhabiliter dans l’histoire de l’Angleterre… Et elle va réussir !

Respectueux du combat de Philippa (elle-même étroitement associée à la confection de l’œuvre), le film se veut fidèle à ses comportements et à ses sentiments – fatigue, manque de confiance en elle, relations avec son ex-mari, détermination dans sa quête –, et en même temps il fait place à la liberté de créativité du metteur en scène et de l’actrice ; ce qui distingue d’un documentaire cette fiction palpitante, malicieuse et émaillée de péripéties romanesques - comme les apparitions récurrentes aux yeux de Philippa, silencieuses mais expressives et réconfortantes, d’un  Richard qui la hante.

Reconnu sans réserve comme un remarquable directeur d’acteurs, Stephen Frears propose ici une distribution brillante qui culmine avec Sally Hawkins, héroïne au regard pétillant et au sourire irrésistible de plusieurs films de Mike Leigh et de Woody Allen. Cette fantastique actrice réussit à rendre crédible l’invraisemblable remise en question d’une idée reçue depuis 500 ans.

Jean-Michel Zucker

Commentaires