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Chemins d’unité

Vers un œcuménisme de l’écoute

27 décembre 2023

Christian Barbéry, pasteur à Cannes, délégué à l’œcuménisme en région PACCA, répond à nos questions sur les transformations qu’il a pu vivre dans ce domaine.

Quelles évolutions discernez-vous dans la marche œcuménique de ces dernières décennies ?

On a longtemps eu une approche frontale, qui a permis d’avancer sur le plan théologique – sur les malentendus, les préjugés. On sait maintenant sur quoi on bute – l’ecclésiologie, les ministères, et puis l’eucharistie/la sainte cène… Ces points de convergence et divergence ont été travaillés un peu partout. Depuis 30 ans, on tourne en rond et on a vu qu’il fallait poursuivre autrement.

Le Conseil œcuménique des Églises a lancé le Forum chrétien mondial (effectif en 2013) comme une nouvelle manière de travailler les uns avec les autres. Nous ne recherchons plus notre identité commune : sur le Seigneur, la Bible, le salut, un accord a été signé entre la Fédération luthérienne mondiale et les catholiques, puis les réformés.

Nous sommes « un » en Christ, c’est le point de départ existentiel. À partir de là, il faut trouver de nouveaux chemins pour se connaître mutuellement, comprendre comment l’autre a été rencontré par le Christ dans son itinéraire. C’est l’expérience du Forum : un œcuménisme de l’écoute, un œcuménisme « réceptif », un vrai chemin de conversion. Je ne cherche pas à convaincre l’autre, mais dans l’écoute de son témoignage je reconnais en lui un frère, un chrétien.

(© Wikimedia Commons-NdeFrayssinet)

 

Est-ce que cette approche touche les paroisses ?

Pas encore ! On reste sur des schémas classiques. Néanmoins, il existe différentes possibilités pour envisager cela : les groupes de partage, la lectio divina… Cette dernière permet de s’engager dans un travail non pas historico-critique ou savant, mais plus existentiel : comment le texte me rejoint-il ? On peut tous se retrouver autour du texte commun, la Bible : comment me parle-t-il dans ma culture ? Cela donne des échanges très intéressants où l’on reconnaît l’autre comme chrétien à part entière.

 

Où en sont les couples mixtes ?

Il y a 30 ans, ils étaient un aiguillon pour les Églises. Ils ont joué ce rôle, poussé les Églises dans leurs retranchements et fait bouger les lignes. Il faut être reconnaissants à l’Association des foyers mixtes pour son travail.

Aujourd’hui, dans nos Églises protestantes, les couples dits « mixtes » sont une majorité. Les trois quarts des mariages concernent des couples dont le conjoint est catholique ou autre. Cela change le visage des paroisses ! En même temps, les enjeux ne sont plus les mêmes. Les couples mixtes sont décomplexés et sans militantisme. Avantage ou inconvénient ? L’important, c’est qu’ils puissent trouver leur place.

 

Observez-vous une fatigue œcuménique ?

Très certainement. Un découragement de l’ancienne génération qui espérait plus, qui attendait une unité plus visible, plus vite. Les fidèles ou des prêtres ont en fait une question prioritaire : comment survivre dans la sécularisation ?

En même temps, il y a un souci d’évangélisation et de témoignage commun, au plan national et international. Catholiques et protestants se retrouvent pour témoigner ensemble de leur foi au Christ. Sont organisés actuellement des « Événements exponentiels » au cours desquels des « leaders chrétiens » s’expriment sur l’évangélisation. Nous vivrons un tel événement le 10 février au temple de Cannes.

Alors oui, on constate un désintérêt pour certaines formes traditionnelles comme la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, mais des initiatives émergent en parallèle, avec même un foisonnement, parfois : invitations réciproques, actions sociales menées ensemble…

 

N’existe-t-il pas aussi un œcuménisme plus spécifiquement « spirituel » ?

Oui, par la prière on peut s’engager dans un œcuménisme spirituel dans plein de lieux. Il n’est pas toujours visible, ce ne sont pas de grands événements comme « Le jour du Christ ». Il passe plus par des groupes locaux, à échelle humaine. Par exemple, nous aurons un week-end œcuménique « À la découverte des spiritualités chrétiennes », fin avril sur les îles de Lérins, pour découvrir l’« œcuménisme réceptif ».

On pourrait également parler du synode catholique à Rome. C’est une première, cette journée de prière pour le synode avec les autres Églises à Rome… Et quelle belle initiative, de prier pour une autre Église et d’invoquer le Saint-Esprit pour elle !

Propos recueillis par Séverine Daudé
Magazine Échanges

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