Eglise et société

Bienvenue sécularisation !

21 avril 2020

Voici des nouvelles du Québec, société totalement sécularisée. Depuis "la révolution tranquille" des années soixante, toute référence religieuse a été abolie.

Nous voilà donc au Québec depuis bientôt six mois, en résidence dans l'Église Unie du Canada. En principe pour neuf mois, mais il se pourrait que les circonstances sanitaires nous fassent jouer les prolongations. On verra bien !

Un peu d’histoire

Les Français ont perdu la bataille contre l'armée britannique, en 1759. Le Canada est donc un pays anglophone et protestant, sauf le Québec, francophone et catholique. La Belle Province a pu garder l'usage du français, grâce à l'Église catholique qui a négocié cette exception linguistique. Du même coup, elle se faisait alliée du pouvoir et assurait sa main-mise sur les consciences québécoises. Les protestants anglais avaient le pouvoir économique (partagé avec les riches catholiques, l'argent ayant ses vertus œcuméniques) et l'Église régnait sur les âmes. En fait, sur tous les domaines de la vie : le curé contrôlait le lit conjugal, la vie sociale, l'éducation. Les femmes à leur place, les prélats à la leur ! Tout allait donc pour le mieux.

Le déclin

Mais, c'était trop. Trop lourd, trop étouffant. Et par un mouvement tectonique de l'histoire, la liberté a ouvert un cratère dans le flanc du manteau épiscopal. Sans barricade, sans violence les couvents et les pensionnats de sinistre mémoire se sont vidés, les églises ont été désertées. Les références sont devenues autres. Avec le catholicisme, c'est l'idée même de religion qui a été répudiée, synonyme d'illusion mensongère et aliénante. Croire est désormais suspecté d'obscurantisme. Mais, paradoxe, on est aujourd'hui prié de croire en la science ! Qui du coup perd son statut scientifique (donc provisoire) pour devenir une religion. On a fait sortir le religieux par la fenêtre… on le fait rentrer par la porte, avec sa litanie de permis et d'interdits, son univers de "bonne conscience" promu en horizon sacré ! Qui nous délivrera des idoles ?

La sécularisation

En ce sens, la sécularisation est une chance. L'Évangile n'a pas vocation à promouvoir une société soi-disant chrétienne. C'est même un de ses enseignements maîtres : Dieu -enfin, tel que dévoilé en Jésus-Christ- n'entend pas coloniser la terre ni l'histoire. Il l'appelle, la suscite, l'éveille, lui donne sa pleine dignité, sa pleine altérité. S'il est père, c'est pour donner un nom gratuit, sans condition et non pour mettre ses enfants au pas. S'il est fils, c'est pour nous libérer de toute dette, pas pour en instituer de nouvelles. S'il est souffle, c'est pour lever un vent de liberté, pas pour obliger à des génuflexions contrites. Si Dieu crée, ce n'est pas pour doter son Olympe d'un jardin d'agrément peuplé de marionnettes qu'il agiterait à sa guise. Il creuse de la place en lui, il s'évide pour faire place à autre que lui. Pourquoi, s'est-on cru autorisé à user de son nom pour régenter le monde ? Abus de pouvoir religieux, toutes confession confondue !

Merci à tous les athées qui refusent cette mise sous tutelle régressive, merci à tous ceux et toutes celles qui ne supportent plus la religion. Ils nous offrent l'occasion de retrouver l'Évangile de Jésus-Christ. Et sa liberté.

Didier Fievet
pasteur retraité

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