Bordeaux

Epreuve et vérité

01 septembre 2019

« L’épreuve comme révélateur de la vérité profonde de l’être » était le sujet de
la très intéressante conférence proposée par le pasteur Éric de Bonnechose,
aumônier de Bagatelle, et le docteur Joël Ceccaldi au Hâ 32.

 

Dans l’annonce d’un diagnostic, les mots peuvent soit blesser, soit aider à surmonter l’épreuve. La question est de savoir à quelle profondeur de l’être pénètrent les paroles reçues. J. Ceccaldi a d’abord rappelé que le mot parole, devar en hébreu, renvoie à une parole qui transforme, une parole performative après laquelle on n’est plus le même ; comme dans l’annonce d’un diagnostic : il y a un « avant » et un « après ».

La puis

 

sance d’une telle parole a un potentiel destructeur. Mais la parole a aussi des mots qui donnent confiance ; c’est le cas du mot amen. Pour le soignant, le défi est donc de trouver les mots qui, sans dissimuler le diagnostic, sauront l’accompagner.

Dans le cadre du parcours de soins, la question de la vérité se pose. La vérité recouvre l’aletheia grec qui évoque la mise en lumière de ce qui est caché, la parrêsia qui figure l’être en vérité, la veritas latine qui implique l’exactitude, et la vérité christique qui est propre à chacun. En quelque sorte, la vérité se crée un chemin jusqu’à coïncider avec l’être lui-même. Dans les faits, l’annonce d’une maladie grave provoque souvent une sidération du patient qui n’entend pas ce qui lui est dit, puis questionne sur la gravité, mettant en jeu une série d’émotions, avant de percevoir l’information comme une épreuve à vivre, ouvrant ainsi à des questions existentielles. Le médecin doit se montrer disponible et répondre avec bienveillance. L’aumônier se penche sur la notion d’épreuve qui interroge la vérité profonde de l’être, c’est-à-dire sa singularité, se demandant si cette vérité avait besoin de l’épreuve pour venir au jour, comme un évènement qui révélerait ce qui est solide en chacun. Trois réactions s’observent en pareil cas : soit l’effondrement, lorsque l’épreuve a été trop violente et qu’il est impossible de mobiliser les forces pour surmonter l’épreuve, soit la résistance, avec parfois des stratégies de colmatage pour conjurer l’angoisse, soit une attitude de recomposition à partir de ce qui reste solide, parfois accompagnée de décalage, voire d’humour.L’aumônier nous a fait part de deux convictions : d’une part, la crise est l’occasion d’entreprendre un travail sur soi, à la découverte de la partie profonde de son être. D’autre part, chaque être demeure plastique, recomposé à la suite de l’expérience vécue. La lecture de quelques vers de Qui suis-je ? de Dietrich Bonhoeffer a terminé la rencontre : ...Qui suis-je ? Dérision que ce monologue ! Qui que je sois, tu me connais : tu sais que je suis tien, ô Dieu !

Jean-Pierre Bouscharain
Membre Hâ 32

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