Témoignage
Vivre sept ans en terre d'Islam a renforcé ma conviction œcuménique.
Pour chatouiller un peu mes amis protestants sur l'œcuménisme, j'aime parfois citer le cardinal Etchegaray, d'origine basque avec cette phrase prononcée lors de la semaine du Pays Basque en 2008 : « Donc si on est fidèle à suivre Jésus, avec parfois des différences culturelles, des différences rituelles même, c'est Jésus qui reste le chemin qui nous unit, tous les Chrétiens, et ce sera toujours ainsi ».
L'Église unique ?
L'Église Unique, pour moi elle existe depuis longtemps, du temps du Scoutisme Unioniste. La séparation des Églises est-elle une punition, un obstacle insurmontable ? Sommes-nous condamnés à cette situation ? Ou bien voulons-nous contribuer à détruire les frontières qui nous divisent, comme les allemands ont détruit le mur de Berlin ? Fallait-il, en 1983, abandonner mon projet de mariage avec une catholique, à cause de la frontière invisible ?
Comme dans le film "les lois de l'hospitalité", on accueille ses voisins et ses frères sous son toit. Celui qui ne tient pas sa fourchette comme nous, doit il être exclu de la table commune ?
Un parcours personnel atypique
J 'ai vécu un parcours spirituel très atypique. D'éducation et tradition protestante, j'ai été baptisé, ai reçu l'instruction religieuse "complète" mais ai décliné toute forme de "première communion". Par honnêteté je crois, pas par révolte. Un beau jour, vers mes 40 ans, lors de la confirmation d'un neveu, j'entends une petite voix avant la Sainte Cène qui me dit à peu près ceci : " et alors, puisque tu es avec nous, tu comptes rester encore longtemps sur le bord du chemin ? ". Cet appel n 'était, évidemment, ni protestant, ni catholique. Ce que ma mère m 'avait résumé 20 ans avant : "Tu es invité permanent par ton baptême, tu as toujours ta place et choisiras de répondre à l'invitation à la Cène quand tu le souhaiteras".
7 ans en Arabie Saoudite
Ma femme et moi ne sommes que moyennement pratiquants, mais comme des "bi-nationaux" qui se reconnaissent autant chez les catholiques que les protestants. Nous avons vécu presque sept ans en Arabie Saoudite. Dans ce beau pays, toute célébration chrétienne est strictement interdite, et punie de prison, sauf en lieu diplomatique tenu secret. Pendant cette période, nous avons vécu dans ce qui préfigure l'Église unique, avec nos frères catholiques, orthodoxes, syriaques, coptes, maronites ; plus de dix nationalités. Une bouffée d'oxygène pour tous les participants. L 'office avait lieu pendant le week-end musulman, et de fait, ouvertement œcuménique. La liturgie vénérait Saint-Maron et Saint-Charbel, les Saints Patrons des chrétiens du Liban, dont les portraits entouraient un simple crucifix sur l 'estrade de la salle de réunion. Le prêtre, probablement maronite et nos amis catholiques trouvaient évident qu'un protestant puisse participer aussi à l'Eucharistie dans cet environnement si "exceptionnel".
Hospitalité eucharistique pour tous les chrétiens ?
Ce que je ressentais avant comme "exceptionnel" est devenu une évidence. Quelles que soient les considérations théologiques qui me dépassent, l'Eucharistie est l'invitation divine à tous les chrétiens rassemblés ("Heureux les Invités...). Le groupe œcuménique du Pays Basque auquel j'appartiens connait ma position. Je ne communie pas chez les catholiques si je risque de choquer. Mais dans le cas contraire, j’accepte leur invitation secrète, ce signe de "tu viens avec nous" comme la confirmation joyeuse que Dieu nous y invite tous.